Une maison dans les bois [Libre]

La forêt... C'est magnifique, la forêt !
Les découvertes... C'est magnifique, les découvertes !

Pantera n'en n'était pas à sa première balade dans les bois de l'île mais elle n'avait pas fini de découvrir des jolies choses qui émerveillaient ses yeux dissimulés derrière sa longue frange noire. Elle adorait cet endroit. Si imprévisible, si mystérieux, si frigorifiant. Là où le vent chante le jour et vous glace le sang la nuit. Là où le bruissement des feuilles des arbres camoufle les pas des inconnus et accompagne les cris d'animaux.

La fin d'après-midi arrivait à une grande vitesse -un peu trop vite pensait-elle- car le soleil qui s'était caché derrière les arbres laissait derrière lui une traîné de la couleur d'un arc-en-ciel orangé. Le meilleur pour la fin dit-on. Et effectivement, voilà quelque-chose que Pantera n'avais jamais vu auparavant dans cette forêt. Une maison construite avec des planches de bois. Attendez... une maison ? D'habitude, on parle de cabane; de cabane en bois délavé au toit menaçant de s'écrouler chaque seconde. Une maison hein ? Plutôt intéressant. Magnifique même. Une maison perdue dans les bois, camouflée par une multitudes d'arbres qui semblent tous identiques pour n'importe quel touriste. Mais elle n'est pas une touriste, elle. Ooh que non.

Doucement, elle s'approcha de l'étrange bâtiment qui attirant, si spécial. Enfin quelque-chose qui se démarque dans cette journée ! La jeune gothique sera tout contre elle son renne en peluche avec un chapeau et une cape rose.
Lorsqu'elle fut assez proche, elle leva la main et effleura la porte. Un frisson parcourra son bras. Il n'y avait personne. Elle décida d'ouvrir et de pénétrer en silence dans le bâtiment. Raté. En ouvrant, le bois crissa contre le sol. C'était comme dans les films d'horreur. Quelques pas à l'intérieur et elle remarqua aussitôt les quelques meubles présents : peu de poussière sur le dessus. Quelqu'un était passé récemment ? Quelle déception. Elle tourna la tête, en direction de la fenêtre. Elle pouvait facilement s'ouvrir, le vent aurait très bien pu tout balayer.

Tant mieux. Elle décida de reprendre sa visite. Quelques pas par ci, quelques pas par là. Le parquet grinçait de temps à autres. N'y avait-il donc rien de caché dans cette baraque ? Elle fureta un peu partout dans la pièce. C'était presque triste.

C'est alors que la porte claqua. Pantera sursauta intérieurement, restant inexpressive au visage. Elle serra fort sa peluche d'une main et de l'autre se munit d'un de ses moulinets à lames -armes ressemblant a des jouets pour enfants. Elle sentait son coeur battre plus vite. Si elle n'était pas la première, il se peut que la personne étant venue ici est toujours présente et avait entendu le bruit de la porte. La jeune mafieuse tendit l'oreille, en faisant attention. Il pouvait être dangereux, cet individu. Qui sait ?

La porte s'ouvrit et se referma aussitôt dans le dos de Pantera. Elle se retourna et fronça ses sourcils tout en décontractant la main qui tenait l'arme. Un homme blond s'était introduit dans la maison et la dévisageait. Il avait des bûches de bois à ses côtés et se tenait devant la porte. Qui était-ce ? Le propriétaire ? Apparemment oui, car il ouvrit la bouche pour demander ce qu'elle faisait là et si c'était une voleuse. Il la traita aussi de vilaine intruse et quelques instants plus tard, lui demanda la raison de cette intrusion. Qu'elle audace. Elle n'était ni vilaine, ni intruse. Quand une porte n'est pas fermée, c'est qu'on vous invite à entrer. Elle visitait juste, à la recherche de quelque chose d'intéressant. S'il y avait quelque-chose de superbe, elle l'aurait volé discrètement, mais il n'y avait rien qui se distinguait à ses yeux ici, mis à part la façade de la maison.

- Alors, tu parles où dois je te rappeler qu'il est interdit d'entrer chez les gens sans être invité.

Elle n'avait pas lancé son moulinet, mais l'inconnu commençait déjà à l'énerver un peu. Elle aurait bien voulu lui balancer sa lame afin qu'elle frôle son visage et qu'il se taise mais cet homme était plutôt imposant. Il n'aurait pas été intimidé de cette manière; c'était une mauvaise option. D'ailleurs, on retrouve beaucoup de mafieux sur cette île perdue. Il y a bien quelques civils mais si cet individu à construit cette maison lui-même, il est fort et n'est pas quelqu'un de normal. Pas normal du tout.
Il était temps pour elle de parler afin de calmer un peu les choses. Autant dire la vérité.

- J'explorais les lieux.

Elle inclina légèrement sa tête sur sa gauche en laissant pendre dans le vide ses anglaises noires et marqua une pause de trois ou quatre secondes pour réfléchir rapidement à une petite précision à la raison de sa venue. Elle voulait sous-entendre que ça ne la gênait pas de farfouiller partout sans la moindre permission. Elle pouvait très bien être une personne silencieuse et gracieuse mais là, elle avait envie de se rebeller contre lui. Contre le boss. Contre le monde. Elle allait devenir l'inexpressive Pantera qui ne se soucie de rien.

- Un peu comme j'explore les forêts.

Elle leva la tête en faisant deux pas en arrière pour inspecter le plafond qu'elle n'avait pas encore regardé. Il était plutôt bien fait pour une maison en bois. Elle ne pouvait pas bien distinguer les détails, mais les planches semblaient avoir été bien polies. Elle pivota lentement pour revoir tout ce qui l'entourait et lorsqu'elle s'arrêta, elle fit un panoramique vertical avec sa tête pour regarder l'homme blond. Elle ne l'avait jamais vu. Est-ce que c'était un bûcheron ?

D'abord il la traitait comme un intruse avec un ton dominateur, mais dès qu'elle répondit qu'elle explorait, il lui dit de ne pas se gêner et espéra même que la décoration lui plaise. Il en devint presque gentil. Pantera ouvrit la bouche, voulant lui faire remarquer que ses paroles étaient complètement opposées mais elle se retint et ferma son bec aussitôt. Mieux fallait profiter de l'hospitalité soudaine du grand homme blond avant de se faire jeter dehors comme un vulgaire mouchoir usé.

- Un café peut être ou une tisane ? Et ne restez donc pas là, il y a une autre pièce à côté. Je vais vous faire visiter pendant que l'eau bout.

Après avoir posé deux tasses sur une table et commencer à bouillir de l'eau, elle le suivit du regard; il ouvrit une porte, entra dans la pièce et se retourna à moitié recouvert par l'ombre du mur pour s'adresser face à la petite brune.

- Par ici, c'est la salle de bain. Vous pouvez aller voir. Puisse que vous êtes là, autant en profiter.

Elle se contenta de hocher la tête et tout à coup, il y eut un déclic dans sa tête. Il y avait une salle de bain dans une maison en bois en plein milieu d'une forêt sur une île perdue en plein dans l'océan ? Elle supposa qu'il avait aussi l'électricité et le gaz puisqu'il faisait bouillir de l'eau. Au manoir, il n'y avait pas tout ça. Comment avait fait cette homme ? C'était extraordinaire. Elle jeta un dernier coup d’œil à la pièce principale et remarqua que tout était plutôt récent. Une table et un placard qui ne grincent pas, des tasses, une cuisine américaine avec des tabourets... mais d'où sortait-il tout son matériel ?

Ses pas curieux la portèrent jusqu'à l'intérieur de la pièce qui s'avérait être une chambre. Une salle de bain hein ? Quelle blague. Un lit, une table basse, une commode... Où sont le carrelage, le lavabo et le pommeau de douche ? Pas dans la pièce en tout cas. Elle le sentait il se moquait d'elle. Tant pis alors. Elle inspecta tout de même, histoire de voir s'il n'y avait pas des boutons pour les yeux de ses peluches.
Dans la pénombre, l'idée d'allumer la lumière ne lui étant pas venu à l'esprit puisqu'elle avait pris l'habitude des bougies, une porte se dessina dans le fond. La jeune brune tourna la poignée, accédant enfin à ce qui était devenu la terre promise pendant quelques secondes tellement les lieux dégageaient une forte lumière. Elle se rendit compte que le Japon lui manquait. Vivre comme il y a un siècle, c'est bien sympathique mais le confortable est une part de sa vie.

Pantera revint s'asseoir sur une des chaises de la cuisine en tirant discrètement sur le bas de sa jupe pour ne pas qu'elle se froisse et se coince entre le siège et les pieds du tabouret. Lorsqu'elle fut installée, elle murmura quelques mots pour dire qu'elle ne buvait pas de café et qu'elle n'avait pas besoin d'une tisane car elle n'était pas souffrante d'une quelconque maladie.
Sa voix était habituellement monocorde, mais tant de modernité en quelques minutes sont beaucoup trop de choses d'un coup, alors elle laissa une pointe d'envie et d'admiration se glisser dans ses paroles. Elle n'avait rien contre ce qui était ancien, au contraire elle adorait cela, mais de temps en temps elle en avait bien besoin.

- Eh bien, vous êtes bien équipé.